La couleur d’une voix

Didier Combeau

Editions du Félin

Marian Anderson fut l’une des plus grandes contraltos de son temps, mais dans une Amérique encore ségrégationniste la couleur de sa peau l’obligera à faire face à de nombreux obstacles.

Marian Anderson est née à Philadelphie en 1897, elle se fait remarquer par sa magnifique voix dès son plus jeune âge car son timbre couvre trois octaves et sa réputation dépasse l’enceinte de son église dans le chœur dirigé par son père à la Union Baptist Church.



Cependant à la mort de son père pour subvenir aux besoins de sa famille elle doit se former au métier de secrétaire mais son amour pour la musique reste intact.

Un jour elle est remarquée par la soprano Mary Sanders Patterson qui voit en elle un diamant brut et qui lui donne gratuitement des cours de technique vocale

Dès ses premiers concerts, Marian Anderson séduit car elle mêle aux mélodies classiques européennes des airs de negro spirituals, il s’agit de son héri­tage qu’elle assume avec fierté.

Même si elle chante du Bach et du Haendel , du Schubert, du Schumann, du Brahms, du Scarlatti et du Verdi avec brio, ses racines et son âme sont le negro spiritual.

Mais la discrimination se perpétue et en 1939 bien qu’elle soit devenue une artiste mondialement reconnue alors qu’elle demande de pouvoir se produire en concert au Constitution Hall à Washington, l’association « Daughters of the American Revolution » (les Filles de la Révolution Américaine) qui gère ce monument, lui oppose un refus catégorique. 

Mais que cela ne tienne malgré ce revers de médaille avril 1939, Marian Anderson chante lors d’un concert organisé par Eleanor Roosevelt devant le Lincoln Memorial, après qu’il lui a été refusé d’accéder à la salle où elle devait chanter quel émotion et quel événement et quelques mois plus tard la guerre survient en Europe.

Le 7 janvier 1955 la contralto se produit sur la scène du Metropolitan Opera House, elle y interprétera le rôle d’Ulrica dans Un Bal Masqué de Verdi, c’est la première fois qu’une artiste de couleur chante sur la célèbre scène new-yorkaise.

Puis en 1957, Marian Anderson est envoyée comme « ambassadrice de bonne volonté » en Inde et en Extrême-Orient par le Département d’Etat américain, tout comme Louis Armstrong l’avait été en Afrique l’année précédente.

En 1958, le Président Eisenhower la nomme « déléguée au Comité des Droits de l’Homme aux Nations Unies » et en janvier 1961, elle chante à la soirée d’investiture du Président Kennedy. 

Enfin, sa voix s’affaiblissant en 1964 elle entreprend une vaste tournée d’adieu et c’est à Washington par un concert au Constitution Hall, dont l’accès lui avait été refusé un quart de siècle plus tôt, que débute cette grande tournée mondiale.

La tournée s’achèvera le dimanche de Pâques 1965 au Carnegie Hall de New York.

Maria Anderson meurt le 8 avril 1993.

A haïr les gens, on perd beaucoup de temps

Mon avis :

Ce récit m’a permise de découvrir un destin fascinant celui d’une petite orpheline de Philadelphie devenue une icône des droits civiques trois décennies avant le discours que Martin Luther King .

Celle que Toscanini a qualifié d’une « voix comme on en entend qu’une par siècle  » entre son concert de 1939 et son récital de 1965, est parvenue à gommer la color line dans le monde de l’art lyrique et à ainsi ouvrir la voie à Robert McFerrin, à Camilla Williams, à Léontyne Price, à Jessye Norman et à bien d’autres.

Juste avant d’être assassiné, le président John Fitzgerald Kennedy lui a décerné la plus haute distinction, la Presidential Medal of Freedom.

De même des douzaines d’universités l’ont élevée au rang de docteur hongrois causa.

Le président Barack Obama avait décidé en 2016, de la faire figurer sur les nouveaux billets de 5 dollars.

Grâce à elle et à bien d’autres des publics mixtes peuvent applaudir des artistes afro-américains sur toutes les scènes des Etats-Unis.


Aujourd’hui les noirs et les blancs partagent les mêmes espaces tels que les restaurants, les hôtels, les trains, les bus, les hôtels mais pour autant les minorités sont toujours visibles et les prisons sont peuplés d’afro-américains.

D’autant plus que les divers scandales de ces dernières années s’agissant de la brutalité policière envers les afro-américains dont Michael Brown, Terence Crutcher,Eric Garner, Tamir Rice, Alton Sterling, George Flyod perpétuent les préjugés et les blessures pas encore cicatrisés de l’exclavage présent sur le sol américain.

Malheureusement le ressentiment n’a fait que grandir et le pays se trouve de plus en plus fracturé politiquement et socialement .

En conclusion, j’ai apprécié cet ouvrage car tout d’abord j’ai pu découvrir la vie de Marian Anderson, en effet l’on a toujours l’impression que l’art lyrique est réservé à une certaine catégorie de personne, aussi de savoir que cette femme afro-américaine a pu exercer son art ainsi que bien d’autres part la suite m’a énormément plu.

Ensuite, au travers de la vie de Marian Anderson l’on peut découvrir la vie de personnages marquants qui ont été des pionniers ou des leaders des droits civiques, des artistes, des intellectuels ou des victimes de la ségrégation et du racisme Etats-Unis .

C’est un récit qui mérite à mon humble avis d’être découvert par le plus grand nombre car il montre que la musique quelque soit la couleur de l’interprète est universelle.

Ma note:

❤️❤️❤️❤️❤️

5/5