Arnaud Rozan

Edition Plon

Au coeur du Tennessee des années vingt, Sidney, un adolescent noir, se retrouve pris au piège du désir de deux jeunes filles blanches qui provoquent le massacre de sa famille en l’accusant à tort.

Pourquoi un shérif adjoint a-t-il pris le risque de lui épargner le lynchage ? Dans cette Amérique où n’avoir qu’une seule goutte de sang noir expose au danger, Sidney est-il pour autant sauvé ? 
Quand le jeune homme reprend ses esprits après les horreurs vécues, sa mémoire s’est effacée.
Un lien étrange l’unit néanmoins à ce policier et à un mystérieux garçon, qu’il va désormais suivre comme son ombre dans une tragique odyssée. Car un tourbillon de violence poursuit implacablement Sidney, des émeutes de l’été sanglant de Chicago jusque dans l’Arkansas, sous fond de blues de Bessie Smith, sœur exilée du Sud.

Dans cette quête de ses racines, quel rôle vont jouer Robert Abbot, porte-parole de la cause des Noirs, Alma, la jeune aveugle, Lewis, l’ancien esclave, et les âmes tourmentées de Harlem ? 

Mesure-t-on à quel point des liens de sang se sont créés au cœur de la haine entre les Noirs et les Blancs, de génération en génération, au-delà de l’inimaginable ?

Ouvrage de la rentrée littéraire , à la lecture de ce résumé jai tout de suite été happée et curieuse de savoir comment l’auteur a mis en scène une histoire sur un thème aussi important qu’est le racisme.
Car même si il s’agit d’un pan glaçant de l’histoire américaine les récents événements ont montré que les choses n’ont pas totalement changé.

En l’espèce , nous sommes dans le sud des Etats-unis précisément dans le Tennessee ségrégationniste des années 20.
Un jour le quotidien d’une famille va s’assombrir de part un événement malheureux …

En effet, Sidney a pour habitude de se baigner nu dans un rivière se croyant seul mais le sort étant qu’il ne l’est pas totalement car il est épié par deux jeunes filles blanches depuis un certain temps.
Mais un jour un événement se produit , comme à l’accoutumée elles se retrouvent au point d’eau pour l’espionner mais l’une d’entre elle chute d’un buisson de ronce.

Entendant le bruit , Sidney vient à leur aide ne se doutant pas qu’elles le connaissait déjà , mais élevées dans la crainte des noirs elles sont effrayées et décident de s’enfuir.

Désormais que raconter à leurs parents , comment expliquer leur état , les habits en lambeaux et les tâches de sang qui sont en réalité des mures écrasées.

Elles échafaudent alors un plan qui sera lourd de conséquence mais qui se soucient des noirs?

C’est pour cela qu’ elles décident de dire qu’ils les a agressées.

A partir de ces aveux les habitants, sont affolés il faut punir ces noirs, mais il ne fa!ut pas prévenir le shérif qui devra suivre la procédure, il vaut mieux abattre toute la famille de Sidney pour qu’ils paient.

« Le père de Janyce donna le signal que la pendaison pouvait commencer. Il désigna de son index la branche tordue dont l’écorce luisait sous le flamboiement des flammes s’élevant de la maison. Tels des puisatiers qui remontent leur seau de boue des tréfonds de ma terre, les deux hommes se suspendirent à la corde de tout leur poids. La tresse de chanvre pénétra dans la chair d’Ella et Eula, et leurs petits pieds s’agitèrent au-dessus du tapis de fleurs blanches. Leur dernier souffle s’étouffa dans le cri qu’elles poussèrent au moment d’être arrachées à la terre.« 

Ainsi toute sa famille meure , son père et ses petites soeurs sont pendus et sa mère enceinte est violée à mort.
Sidney est le seul survivant mais c’est sans compté sur l’aide du shérif adjoint…

Il est alors soigné et rétabli il se rend de Chicago à New-York où il rencontrera ceux qui subissent , ceux qui se battent pour survire et ceux qui se battent pour que ces oppressions cessent.


Mon avis :

Arnaud Rozan traite de façon magistrale ce roman retraçant l’histoire des Etats-unis ségrégationnistes .

C’est un roman dur que l’auteur a pensé et a écrit avec finesse et minutie , il met en relief ces faits de sociétés et les relations qu’entretiennent les noirs et les blancs à cette époque.
On y découvre ou redécouvre les lynchages , la haine de ces deux communautés mais aussi les peurs par manque de connaissance.

Mais malgré ces faits marquants les personnages ne sont pas attachants même si nous sommes touchés par le drame de la famille de Sidney et la découverte des périples de l’adolescent ; En effet , à travers ses yeux on découvre des protagonistes noires et leurs conditions de vie .


Mais à mon avis l’auteur n’a pas voulu axé son récit sur la personnalité des personnages mais sur la retranscription de faits qui se sont passés de façon détaillée , en racontant la pendaison par exemple des deux fillettes ce qui nous permet d’imaginer cet acte odieux.

Les lynchages étaient monnaie courante et étaient souvent le fruit de quiproquos dans la mesure où être noir était synonyme de non droit.

« Tous ces Blancs autour de nous, continua Lewis, un jour, on danse et on trinque avec eux. Un autre, nous sommes à feu et à sang. Et demain, que se passera-t-il ?« 

Par ailleurs l’auteur de façon assez succinte va faire état d’un phénomène fréquemment utilisée aux Etats-unis le passing.


Qu’est-ce que c’est?

Née dans le contexte historique de la ségrégation raciale aux États-Unis. Le terme faisait alors référence aux expériences et trajectoires de personnes initialement identifiées comme Noires qui « passaient pour » Blanches.
D’apparence blanches ces personnes avaient des parents ou des grands-parents noirs en vertu de la règle de la goutte de sang noire elles étaient donc considérées comme noires.

Dès lors rêvant d’une autre vie des personnes décidant de de fuir leur passé et de se créer un futur moins restreint, c’est cette vie qu’a pu se créer l’adjoint White qui se sent irrémédiablement uni à SIdney et décide l’aider.

On en apprend plus sur lui et découvre que malgré tous ses efforts le passé nous rattrape toujours…

« One-drop rule » : n’importe quel degré d’ascendance africaine était suffisant pour classer la personne comme un « nègre ».

Cependant Arnaud Rozan nuance son propos le shérif n’est pas le seul à aider de part ses origines, le docteur Campbell lui aussi malgré sa blancheur se sent proche de Sidney car il assisté durant son enfance aux lynchages et a compris qu’ils s’agissaient de choses inhumaines .

En définitive Arnaud Rozan à travers ce roman n’a pas essayé de refaire parler l’histoire mais il cherche à nous interpellé sur l’atrocité des faits qui malheureusement se produisent encore aujourd’hui sous d’autres formes .

C’est une lecture choquante mais nécessaire car aujourd’hui malheureusement la voie vers l’égalité est encore loin au XXI ème siècle.

Ce roman a frôlé le coup de coeur mais selon moi des aspects auraient pu être encore plus développés , assurément c’est une lecture marquante , audacieuse , riche et très bien écrite.

Ma note :

❤️❤️❤️❤️

4/5